Les années passèrent. Dans le palais de Mycènes, Clytemnestre avait
cessé d'attendre son royal époux. Après le désespoir qui suivit la mort de
sa fille, Iphigénie, un autre homme Egisthe, le cousin d'Agamemnon était entré
dans sa vie. Lorsqu'elle eut compris que l'expédition de Troie, victorieuse
pour l'armée grecque avait pris fin, sa rage s'était ranimée et avec son amant,
Egisthe, elle avait préparé un complot contre Agamemnon. Le sang des Atrides
allait encore couler !
Clytemnestre était enfin prête : pour lui, elle avait revêtu ses plus
beaux atours ; pour lui, elle avait ordonné qu'on étende l'immense tapis rouge
de bienvenue ; pour lui, elle s'était composé un visage de circonstance où
elle avait effacé la haine. Oui, elle avait entendu dire qu'il ne revenait
pas seul, qu'il était accompagné d'une princesse troyenne, une fille de Priam,
appelée Cassandre. Mais qu'importe ! Egisthe était là, tapi dans l'ombre,
prêt à agir quand elle lui ferait signe.
Voilà Agamemnon, triomphant, valeureux guerrier ! Quel grand jour pour
Mycènes ! Il avait franchi les portes du palais ; son épouse l'avait accueilli
comme il convenait à une reine. Non, il n'avait pas eu peur : Clytemnestre
semblait si sereine. S'était-il alors souvenu des paroles de sa captive troyenne,
Cassandre ? Elle l'avait supplié à genoux et en pleurant lorsqu'elle se trouvait
dans sa tente, de ne pas revenir dans sa patrie. Elle avait vu la mort ! Pour
lui, ce n'était qu'un caprice de femme jalouse ! Et maintenant il marchait
sur l'immense tapis rouge qui le conduisait à ses appartements. Des serviteurs
sous les ordres de Clytemnestre s'affairaient : ils lui enlevaient le casque
et l'armure et l'invitaient à entrer dans un bain, spécialement préparé pour
lui. Puis, ils se retiraient. Agamemnon se laissait enfin aller, à ce repos
bien mérité. Soudain, il leva les yeux et il croisa le regard de sa femme.
Et il y vit la haine ! Elle fit un geste ; un homme caché dans l'ombre bondit
et enfonça violemment dans la poitrine du roi un poignard acéré. Le sang du
plus grand des Atrides se répandit tristement…
Malheureuse Clytemnestre, qu'avais-tu fait ? Ne savais-tu pas que la vengeance
appelait la vengeance ? Egisthe l'avait compris, lui. Déjà, il courait dans
le palais avec ses hommes. Tes serviteurs te dirent par la suite que ton autre
fille, Electre et ton jeune fils, Oreste
avaient disparu. Ils te dirent encore que Cassandre, la prophétesse condamnée
par les dieux à ne jamais être crue, était tombée sous les coups des sbires
d'Egisthe, que ses deux enfants qui étaient aussi ceux d'Agamemnon gisaient
morts assassinés. Malheureuse Clytemnestre ! Le peuple regrettait déjà le
grand Agamemnon, le vainqueur des Troyens. Ton amant Egisthe, le nouveau roi
de Mycènes allait poser sur toi ses mains tachées du sang des Atrides !
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